par Wissam Mghazli

La procédure de sauvegarde : à quel moment la choisir ?

Votre entreprise est confrontée à des difficultés économiques sérieuses mais qui vous semblent toutefois surmontables ?

Le présent article vous éclaire sur la procédure de sauvegarde classique, destinée en pareille situation à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.

Qui peut demander l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ?

Les entreprises exerçant une activité commerciale, artisanale, agricole ou libérale (personne physique ou morale), les micro-entrepreneurs et les associations peuvent demander l’ouverture de cette procédure.

La procédure de sauvegarde s’adresse aux entreprises qui justifient de difficultés insurmontables mais ne se trouvent pas en situation de cessation de paiement (lorsque l’actif disponible ne permet plus de faire face au passif exigible). Cette règle connait cependant une exception en cas de procédure de sauvegarde accélérée ou financière accélérée.

Ainsi, l’entreprise doit faire face à des difficultés sérieuses, qu’elle ne peut résoudre seule, peu important leur nature : elles peuvent être liées à l’activité exercée, mais aussi être de nature juridique ou sociale.

Les juges posent toutefois une limite à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, lorsque les difficultés proviennent d’une fraude du dirigeant.

Par ailleurs, l’entreprise ne doit pas faire l’objet d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire. En revanche, la sauvegarde peut être ouverte à la suite d’une procédure de conciliation, en cas de désaccord des créanciers sur l’accord proposé.

Le jugement instaurant la procédure de sauvegarde

Saisine du tribunal : Afin de pouvoir bénéficier d’une procédure de sauvegarde, le dirigeant doit en faire la demande auprès du tribunal compétent. Si l’entreprise exerce une activité commerciale ou artisanale, la demande devra être présentée au greffe du tribunal de commerce. Dans les autres cas, l’on s’adressera au greffe du tribunal judiciaire.

La demande détaille les difficultés rencontrées, les raisons pour lesquelles l’entreprise ne peut les surmonter seule et expose les possibilités de redressement. Elle s’accompagne des pièces justificatives.

Les formalités de publicité liées au jugement : Si la demande est recevable, le tribunal saisi ouvre la procédure. Le jugement dit « d’ouverture » est publié au BODAAC et dans un journal d’annonces légales. Selon l’entreprise concernée, il figure également au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Cette publicité permet de le rendre opposable aux tiers et de lui faire produire ses effets.

La désignation des organes de la procédure :

- Un mandataire judiciaire, chargé de représenter l’intérêt collectif des créanciers ;

- Un administrateur judiciaire, chargé d’assister et de surveiller les actions du débiteur. Sa désignation n’est obligatoire que pour les entreprises de plus de 3 salariés ou réalisant un chiffre d’affaires de plus de 3 millions d’euros H.T.

- Un juge-commissaire, chargé de la supervision de l’ensemble de la procédure. Il autorise, par exemple, le paiement de créances ou les éventuels licenciements.

Les effets du jugement : A l’instar des autres procédures collectives, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde suspend les poursuites individuelles en cours à l’encontre de l’entreprise. Elle suspend également les intérêts légaux et conventionnels, ainsi que les intérêts de retard et majorations.

Au regard des dettes, l’ouverture de la sauvegarde interdit le paiement des dettes antérieures au prononcé du jugement d’ouverture. Les créanciers antérieurs sont empêchés d’engager des actions en justice et doivent déclarer leur créance dans un délai strict de 2 mois à compter de la publication au BODACC.

Quelles sont les étapes de la procédure ?

Première étape : l’observation. La loi prévoit l’instauration d’une période d’observation de 6 mois renouvelable une fois (sans qu’elle ne puisse excéder 18 mois), qui a vocation à permettre l’établissement d’un diagnostic de l’entreprise et envisager des solutions qui seront consignées dans un plan de sauvegarde.

La période d'observation sert à effectuer un bilan économique et social de l'entreprise et à étudier ses possibilités de rétablissement. Un inventaire des biens de l'entreprise est établi.

Pendant cette phase, l’entreprise poursuit son activité. La gestion de l’entreprise continue d’être assurée par le dirigeant. Il peut être assisté par l’administrateur, lorsque celui-ci a été nommé.

Deuxième étape : l’élaboration d’un plan de sauvegarde. Le plan est réalisé par l’entreprise, assistée le cas échéant de l’administrateur.

Ce plan de sauvegarde expose la manière dont l’activité se poursuivra à l’issue de la procédure de sauvegarde et les changements auxquels l’entreprise sera soumise à cet effet.

Le plan peut, par exemple, décider de changer de structure sociale, céder une branche d’activité ou au contraire en ajouter une, faire état de la nécessité d’éventuels licenciements, etc.

La durée du plan ne peut pas excéder 10 ans.

Si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan, le tribunal peut décider d'y mettre fin.

Il est à noter que la crise du COVID a amené les pouvoirs publics à aménager temporairement certaines règles en matière de procédure collective mais leurs effets seront limités dans le temps.

Il est question de l’appréciation temporelle de l’absence de cessation des paiements, la prorogation des procédures en cours, les engagements du débiteur sur le règlement d’un passif estimé ou encore des aménagements relatifs du plan de règlement du passif.

La sauvegarde accélérée

Les principes qui guident cette procédure sont les mêmes que pour une sauvegarde classique. Toutefois, la période d'observation et le plan sont mis en place très rapidement (entre 1 et 3 mois).

La sauvegarde accélérée s’adresse toutefois à un nombre limité de sociétés puisque seules celles faisant l’objet d’une procédure de conciliation peuvent prétendre à sa mise en œuvre.

La sauvegarde accélérée n’est par ailleurs ouverte qu’aux sociétés de taille importante, remplissant au moins l’une des conditions suivantes : employer au moins 20 salariés ; justifier d’un chiffre d’affaires supérieur à 3 millions d’euros H.T. ; justifier d’un total du bilan supérieur à 1,5 million d’euros.

Les sociétés doivent, enfin, avoir des comptes certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable et avoir établi un plan visant la pérennité de l’entreprise approuvé par une majorité de créanciers.

Une procédure de sauvegarder financière accélérée peut être ouverte quand le débiteur est redevable de créances financières importantes, à l’égard d’établissements bancaires par exemple.

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Le cabinet Komon Avocats se tient à votre disposition pour vous accompagner et choisir la procédure collective adéquate en cas de difficultés économiques subies par votre entreprise.

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Co-écrit Mathilde Boucault

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